dimanche 17 mars 2019

Bahubali devenu Gomasteswara nous invite à méditer sur la vanité du monde.

Sravanabelgola a 150 km de Bangalore, sur la route vers Hassan, reste une petite localité dédiée depuis l'aube des temps à la dévotion jaïne. Ces deux collines jumelles et le lac Belgola qui donna son nom à ce village, deviennent le lieu de rassemblement de millions de pèlerins tous les 12 ans (le dernier auquel nous avons participé s'est déroulé en 2018).  A chacun de nos périples dans cette partie sud du Karnataka, nous nous y arrêtons quelques heures afin d'y gravir au moins l'une des deux collines, comme le font les pèlerins, pieds nus sur les 612 marches de granit surchauffé, et ainsi approcher l'imposant "beau seigneur". La statue de Gomateshwara, nom local de Bahubali (frère de Baratha et fils d'Adinatha, roi d'Ayodhya), au sommet de la plus haute colline, vielle de plus de 1000 ans est sculptée d'un seul bloc de près de 17,70 m. Un symbole avant tout : une vie dédiée à la méditation après le renoncement au pouvoir de la vie terrestre. La légende raconte que roi d'Ayodhya souhaitant devenir ascète, laissa son trône à son fils aîné, Baratha, et les quelques fiefs le constituant le royaume à ses frères. Mais l’orgueilleux Baratha ne se contentant pas du cadeau, annexa sans retour les diverses propriétés revenues à ses frères les poussant à s'exiler dans la forêt. Seul Bahubali, athlète aux bras puissants lui résista, ouvrant comme seule issu une guerre fratricide.  
Préférant à la levée d'armées de part et d'autre un combat à la loyale, Bahubali de par sa force herculéenne eut facilement le dessus, et souleva son frère ainé. S’appétant à le projeter violemment à terre dans la poussière il se ravisa, lui évitant l'humiliation, il le déposa délicatement sur le sol avec la bienveillance due à son rang d'héritier de la couronne. Bien que déclaré vainqueur, Bahubali décida de rendre le pouvoir à son frère et ainsi sans contrainte, de son plein gré il pris la décision du chemin de l'exil en forêt en vue d'y méditer sur la vanité du monde. Il fit ainsi retraite sur la plus haute colline de Sravanabelgola où il se tint debout pendant une année entière, dénudé en signe de renoncement, impassible et immobile au point ou la végétation lui grimpa dessus. 
La colline Chandragiri, moins élevée que Indragiri (aussi appelée Vindhyagiri) qui abrite le "beau seigneur", au sein d'une enceinte abrite de nombreux temples jaïns (14). Toujours en son sommet, à gauche en sortant de l'enceinte, à l'écart se trouve la grotte de Bhadrabahu ou ce dernier se laissa mourir (gourou du roi Chandragupta ayant souhaité se consacrer à la méditation, au 3e siècle avant notre ère) . Une dalle porte l'empreinte de ses pieds, à l'endroit où il atteignit le nirvana.  
Pour ces visites, jetez votre révolu en début de matinée ou fin de journée (levers et couchers de soleil époustouflants) car nous vous déconseillons de grimper aux périodes les plus chaudes de la journée ou les centaines de marches de granit surchauffé par un soleil de plomb auront vite raison de votre enthousiasme et des pieds occidentaux. Après être passé devant le bassin sacré au pied de la colline Vindhyagiri, on quitte les chaussures en évitant d'arborer tout article de cuir dont l'usage est prohibé dans la communauté jaïn, pour armé de courage gravir les 600 marches taillées dans la roche et ainsi assister au bain de pieds quotidien du "beau seigneur". 
Bien que baignant dans l'indouisme depuis 1998, cette échappée sur le jaïnisme rassemblant une population de non violents refusant armes, castes et ne mangeant pas d'animaux, reste pour nous une réelle opportunité à la méditation sur la vie. 
Le jaïnisme est une religion dont les origines remontent avant notre ère. Si deux courants de pensée persistent, leur division tient à l'attachement aux choses terrestres et non à la pratique des rituels sensiblement identiques. Parmi les deux communautés on distingue les Digambaras (traduction : vêtu du ciel) dans l'Inde du sud, non vêtus et les Shetambaras vêtus de coton blanc dans le nord que nous avons pu côtoyer, notamment lors du grand rassemblement de 2018. Autre différence de taille entre les deux courants est l'atteinte du nirvana uniquement réservé aux hommes côté Digambaras alors que chez les Shetambaras les deux sexes peuvent y prétendre. De même que le maitre jaïn chargé d'enseigner la voie du moksha (de l'illumination) chez les Digambaras est un homme, chez les Shetambaras c'est une femme.

InDi

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